KERMA
Dès la plus haute Antiquité, la capitale du royaume de Kerma située en amont de la 3ème Cataracte bénéficie d'une situation exceptionnelle : - elle est protégée des incursions égyptiennes par la Grande Cataracte (la seconde). - elle se développe dans un riche bassin arrosé par un réseau fluvial dont l'ancien ouadi el-Khowi. Des études géomorphologiques confirment qu'au IIIe millénaire, des îles et des îlots créent des lieux de vie favorables. Plus au sud dans le bassin de Letti, l'ouadi Howar constitue par ses 1000 km un affluent majeur sur le plan économique mettant en relation le bassin de Kerma avec le coeur de l'Afrique. L'ouadi Howar est doublé par l'ouadi el-Mélik. - à la confluence des pistes reliant l'Egypte à la Nubie, à l'ouest, à travers les oasis libyques, et à l'est, en direction de la mer Rouge, Kerma contrôle les mines d'or autour des 3ème et 4ème Cataractes. - elle détient la clé des échanges des produits apportés par les caravanes en provenance du Darfour et du Kordofan (au sud-ouest) et du pays de Pount (au sud-est). Tous ces avantages confirment la puissance du royaume de Kerma, appelé par les anciens Egyptiens probablement Iam ou/et Koush. Depuis 1986, la capitale éponyme du royaume de Kerma est étudiée par la mission archéologique de l'université de Genève. Durant une trentaine d'années Charles Bonnet en est le directeur. Par ses travaux qui complètent les fouilles de l'Américain George Reisner, il permet de mieux comprendre les vestiges de la ville royale, de la nécropole et du site de Dukki Gel. La ville royale Au IIIe et IIe millénaires avant notre ère, la capitale s'étend sur une vingtaine d'hectares à l'est du Nil. Elle se prolonge au nord-est, par des édifices religieux et un palais d'époque méroïtique. Au sud-ouest, elle est complétée par un temple et un bâtiment administratif construit au Kerma classique (env.1750-1550 av. J.C.). Elle inclut une zone portuaire aujourd'hui dans la ville moderne. Deux nécropoles, couvrant les périodes à partir du Nouvel Empire égyptien (env. 1550-1050 av. notre ère) jusqu'à l'ère chrétienne, entourent l'agglomération au nord et au sud. On estime ces zones urbaines à une cinquantaine d'hectares.
|
Access to the main temple of the royal city of Kerma / Abords du temple divin de la cité royale de Kerma
Main temple of the royal city of Kerma : solid mass made of raw bricks / Temple divin de la cité royale de Kerma : massif plein en brique crue
Probable vestiges of administrative or religious builings in the royal city of Kerma / Arasements de bâtiments probablement à usage administratif ou religieux dans la cité royale de Kerma
Vestiges of administrative buildings, with the trace on the ground of a hut used for meetings / Arasements de bâtiments à usage administratif dont le plan au sol d'une hutte servant probablement à des réunions
Hut for administrative meetings in the royal city of Kerma / Hutte à usage administratif de la cité royale de Kerma
Vestiges of the façade of the main temple in the royal city of Kerma reminding the pylon of the egyptian temple / Vestiges de la façade du temple divin de la cité royale de Kerma rappelant le pylône du sanctuaire égyptien
Steps going to the terrace of the main temple with a full mass of raw bricks as inner structure / Montée vers la terrasse du temple divin dont la structure interne est un massif de briques crues
On the way to the old cemetery of Kerma / Sur le chemin de la nécropole de l'antique Kerma
Funeral temple of the old cemetery of Kerma / Temple funéraire de l'antique nécropole de Kerma
Entrance of the funeral temple (called deffufa by the local people) in the cemetery of Kerma / Entrée du temple funéraire (appelé deffufa par les locaux) de la nécropole de Kerma
Drawing of the funeral temple in the cemetery of Kerma (Swiss mission Dukki Gel-Kerma) / Dessin reconstituant le temple funéraire de la nécropole de Kerma (Mission suisse Dukki Gel-Kerma)
Graves tumuli in the cemetery of Kerma / Tombes tumuli de la nécropole de Kerma
In the cemetery of Kerma, cone usually put on the big tumuli / Cône qui surmontait les grands tumuli de la nécropole de Kerma
Drawing of the tumuli in the cemetery of Kerma (Swiss mission Dukki Gel-Kerma) / Dessin représentant les tumuli de la nécropole de Kerma (Mission suisse Dukki Gel-Kerma)
Inner sketch of the great tumuli at the classical period of Kerma (1750-1450 B.C) - Swiss mission Dukki Gel-Kerma / Plan intérieur des grands tumuli de l'époque classique de Kerma (1750-1450 av. J.-C.) - Mission Suisse Dukki Gel Kerma
Bas-relief fragment of the main door of the funeral temple in the cemetery of Kerma representing the egyptian winged disk / Fragment du bas-relief de la porte d'entrée du temple funéraire de la nécropole de Kerma, représentant le disque ailé égyptien
|
Voir dans le diaporama, le plan de la ville de Kerma de Charles Bonnet (Mission Suisse Dukki Gel-Kerma)
Durant l'Antiquité, cette métropole, résidence des rois et des dignitaires liés à la famille royale est entourée d'une enceinte surmontée de tours protégeant les entrées de la ville. Elle présente des quartiers différenciés. Les vestiges les plus importants sont les arasements d'un palais du Kerma classique, d'un bâtiment circulaire, probablement une grande hutte, et d'un massif en brique crue.
Le massif Identifié comme le temple majeur de la ville, il est appelé par les locaux deffufa. On constate dans sa structure générale, une ressemblance singulière avec la montagne "pure" du Djebel Barkal. Il n'y a aucune cour, ni succession de salles, ni sanctuaire, sauf les restes d'un pylône. Ce massif plein pourrait reproduire le monde chtonien de la résidence d'Amon du Djebel Barkal. Au cours des fouilles, il a été excavé une tête de bélier suggérant un culte où cet animal était son hypostase. Sur les flancs du massif, on distingue l'emplacement de différentes pièces probablement consacrées à des divinités secondaires. Dans cette aire cultuelle, les excavations ont mis au jour de nombreux moules à pain suggérant la production d'offrandes. La hutte Centre de réunion identifié comme un palais, on y observe les traces de quelques magasins. Le palais Erigé à l'époque classique, il abritait probablement une salle d'audience, des pièces d'habitation, des magasins et de grands silos.
- au sud-ouest de la ville, une agglomération secondaire était protégée par de puissantes fortifications dont certaines s'enfonçaient jusqu'à 7 mètres dans le sol. On y distingue deux grandes pièces et une série de chapelles. On s'interroge sur la fonction de cet ensemble. Au fur et à mesure de son développement, la ville s'entoure d'enceintes, de bastions et de profonds fossés. La nécropole Elle occupe une ancienne île du Pré-Kerma (env. 3000-2400 av. notre ère) irriguée à l'époque par un réseau fluvial. A partir du milieu du IIIe millénaire, cet emplacement devient désertique et la capitale se déplace vers le Nil. Au cours des grandes phases historiques étudiées par Brigitte Gratien : Kerma ancien (env. 2400-2050 av. J.-C.), Kerma moyen (2050-1750) et Kerma classique (1750-1450), les tumuli deviennent de plus en plus importants. Ils peuvent atteindre 100 mètres de diamètre vers le milieu du IIe millénaire. Ils sont constitués d'une chambre funéraire qui jouxte un couloir central, sur lequel aboutissent des couloirs secondaires. Les fouilles de Reisner ont révélé la présence de "sacrifiés" accompagnant le sujet régnant qui pouvait être un homme, une femme ou un adolescent. Dans un des grands tumuli, l'archéologue a mis au jour 400 squelettes. Dans beaucoup de civilisations, la mise à mort rituelle a été observée et jusqu'au début du IIIe millénaire, l'Egypte a pratiqué cette coutume. Les raisons étaient sans doute d'ordre religieux et politique. Les Hymnes des Pyramides de l'Egypte ancienne, affirment qu'à son décès, le roi devient une étoile, lumière dont aurait bénéficié, au Kerma classique, l'entourage du souverain dans l'au-delà. Mais on peut également supposer que pour des raisons de stabilité politique, on ait voulu préventivement protéger le souverain élu, de tentatives d'usurpation de pouvoir et d'assassinat, en instaurant ce rite à grande échelle. Il aura malheureusement une incidence sur la démographie, dont profitera l'envahisseur égyptien au début du Nouvel Empire. Dans la ville moderne, Ch. Bonnet a retrouvé au cours de ses fouilles, une tombe d'origine royale, postérieure aux tumuli qui se présentait sous la forme d'un grand puits. Aucune présence de squelettes de « sacrifiés » mais des traces d'incendie volontaire que l'on peut attribuer aux Egyptiens. Voir dans le diaporama, la reconstitution du temple funéraire (KII), des tumuli de la nécropole et le plan de l'organisation interne du tumulus KIII, associé au temple KII Pour plus d'informations, voir Nubie des Pyramides.
La nécropole présente une autre deffufa comportant cette fois, deux salles en enfilade. Il s'agit d'un temple funéraire associé aux tumuli du Kerma Classique. Les fouilles de Charles Bonnet ont révélé des peintures sur les parois inférieures des deux chambres. Des spécialistes ont rapproché ces motifs, de certains décors du temple solaire de Niouserrê (2460-2430 avant notre ère), roi de la Ve dynastie égyptienne dont les premiers représentants étaient originaires d'Eléphantine.
|