LES EXPLORATEURS MODERNES L'édification des deux barrages d'Assouan, en Nubie égyptienne, provoque trois campagnes archéologiques où les recherches sont menées au rythme de leur construction et leur élévation. En 1907, les rendements positifs de la production cotonnière encouragent les Anglo-Egyptiens à procéder à la première surélévation du "Petit Barrage" conçu par l'ingénieur britannique Willcocks. Il avait la particularité de laisser passer le limon avant la nouvelle crue, mais inondait la Basse-Nubie jusqu'à Ouadi es-Séboua sur 160 km. Pour plus d'infos, cliquer ici et lire annexe 1
Deux surélévations (1912 et 1934) sur une hauteur de 10 mètres noient la Basse-Nubie jusqu'à la frontière égypto-soudanaise. Quelques terres demeurent cependant utilisables en juin et en juillet lorsque les vannes du barrage sont ouvertes pour en vider le réservoir. Gaston Maspéro (1846-1916), successeur d'Auguste Mariette à la direction générale du Service des Antiquités de l'Egypte, ordonne d’une part un relevé de tous les sanctuaires susceptibles d'être immergés, et d’autre part une prospection de la zone menacée. Depuis Assouan jusqu'à Abou Simbel, les temples les plus menacés sont Philae, Débod, Kertassi, Taffa, Beit el-Ouali, Kalabsha, Dendour, Gerf Hussein, Dakké, Méharraqa, Ouadi es-Séboua, Amada, Derr et El-Lessiya.
De 1907 à 1911, il charge un groupe de savants de répertorier les vestiges, et leurs travaux sont compilés dans Temples immergés de la Nubie. La prospection est confiée à l'Américain George A.Reisner assisté du Britannique, Cecil M. Firth. Sur 200 kilomètres et jusqu'à Derr, situé au sud-ouest de l'ancienne Ouadi es-Séboua, toute la Basse-Nubie est explorée et, selon l'expression de Jean Vercoutter, «mètre par mètre dans le sens nord-sud et à nouveau dans le sens sud-nord ». Cette première campagne fait l'objet d'ouvrages importants. En 1911, Maspéro réunit dans sa série Documents, l'état des temples de Basse-Nubie et les Anglo-Saxons rédigent The Archaeological Survey of Nubia, objet de parutions successives au Caire en 1905, 1912 et 1927 (pour la seconde surélévation). D'autres savants travaillent en Basse-Nubie : H. Junker à Toschka et G. Steindorff à Aniba, lieu de résidence des vice-rois égyptiens au Nouvel Empire (env. 1450-1050 av. J.C.)
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De 1929 à 1934, la seconde surélévation est précédée d'une campagne similaire, l'immersion devant atteindre la région d'Adindan. La prospection est confiée aux Britanniques W.B. Emery et L.P. Kirwan et donne lieu en 1935 à une publication : Excavation and Survey Between Wadi es-Sebua and Adindan (1929-1931). Les résultats confirment les travaux de leurs prédécesseurs et sont complétés par une étude sur les Royal Tombs of Ballana and Qustul (le Caire 1938). En 1950, une documentation d'environ trente volumes permet d'affirmer que la Basse-Nubie était archéologiquement mieux connue que l'Egypte elle-même ! Qu'en est-il en Nubie soudanaise ? Bien que la région du Moyen Nil se soit pas menacée, en 1906, l'Oriental Institute de Chicago envoie une expédition dirigée par J.H. Breasted. L'année suivante un rapport est publié. Parallèlement, l'Américain Reisner (1867-1942) donne à l'archéologie soudanaise ses premières lettres de noblesse. Il prend la relève de Richard Lepsius et découvre la civilisation de Kerma au niveau de la Troisième Cataracte.
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Dans les années 1940, A.J. Arkell aborde le domaine de la préhistoire. Ses recherches portent sur les grandes phases du Pleistocène (le Paléolithique) et l'Holocène (le Mésolithique et le Néolithique). Il publie en 1949 : The Old Stone Age in the Anglo-Egyptian Sudan and Early Khartoum. Son successeur, P.L. Shinnie, fait éditer Koush, première revue du Service des Antiquités. Lorsque le Soudan accède à l'indépendance en 1956, la direction des Antiquités et de l'Anthropologie est confiée à Jean Vercoutter (1956-1960), premier archéologue français à travailler au Soudan. Il a la lourde tâche de sauver un maximum de vestiges avec un minimum de moyens lors de la construction du second barrage. Ses travaux démontrent l'importance des monuments disparus et le préjudice que subit le Soudan, faute d'avoir eu les moyens de mener des fouilles exhaustives.
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